Ainsi, les clients sont tenus de supporter les éventuels frais de sortie facturés par leur ancien fournisseur, dont les coûts peuvent souvent être démesurés.
L’étude réalisée par l’ACM[1] permet de constater que les deux plus grands fournisseurs de services cloud (Microsoft Azure et Amazon Web Services) détiennent chacun une part estimée entre 35 et 40% du marché – voire davantage, en fonction des verticales considérées. Dans cet environnement économique dominé par deux géants américains, il est difficile pour les autres acteurs du marché de trouver leur place et de se développer dans des conditions de concurrence équitables.
En outre, pour les utilisateurs de services de cloud, le manque de prédictibilité des coûts de sortie à un moment T constitue un frein supplémentaire à la libre circulation des données. En effet, ceux-ci restent très abstraits pour le client, qui ne peut connaître au moment de la souscription du contrat le volume de données qu’il hébergera chez le fournisseur cloud choisi et la fréquence de leur transmission. Le montant des frais dont il devra s’acquitter lors d’un changement de fournisseur ou d’une application multicloud est donc largement imprévisible et dissuade toute migration des données. Pourtant, rien techniquement et commercialement ne justifie de facturer séparément le transfert des données plutôt que d’intégrer les coûts marginaux liés à ces transferts sur le seul stockage des données.
Cette situation devient d’autant plus problématique dans la mesure où la tarification jugée excessive des frais de sortie de services cloud aggrave le déséquilibre du marché. En effet, grâce à ce système rendant dissuasive toute circulation de données, les géants américains peuvent renforcer leurs positions dominantes et verrouiller le choix de leur clientèle : c’est l’effet « lock-in ».
Au-delà de cette dimension de coûts excessifs liée à la question de transfert de données, des difficultés d’ordre technique peuvent apparaître. Elles concernent par exemple l’interopérabilité des données, la portabilité des données, voire un décalage normatif entre pays.
L’offre du secteur des services cloud en Europe est très dynamique, de nombreux acteurs européens du cloud très performants ont su s’installer durablement sur le marché numérique européen. Cependant, la concurrence saine sur ce marché est fortement fragilisée par des pratiques commerciales agressives pratiquées par tous les hyperscalers américains. Notamment, les « egress fees » constituent une pratique injustifiée et déloyale, nuisant fortement à un équilibre compétitif indispensable pour permettre aux acteurs européens respectueux de nos valeurs de poursuivre leur montée en puissance.